Réflexion sur l’aïki-taïso

Par Claude Jacob

Qu’est-ce que l’aïki-taïso ?

Taïso = gymnastique du corps

Aï = harmonie

Ki = énergie

On pourrait donc définir l’aïki-taïso comme une « gymnastique » corporelle visant à harmoniser nos énergies ou harmoniser (coordonner) notre corps et nos énergies.

Qu’en est-il dans la pratique ? et comment l’expliquer dans son entourage ?

L’aïki-taïso est une activité physique qui nous aide à (re)trouver et développer notre liberté de mouvement. Une réappropriation de notre espace corporel par de multiples exercices et mouvements.

L’aïki-taïso met autant l’accent sur l’externe (ce qui se voit) que sur l’interne (ce qui ne se voit pas ou peu).

L’aïki-taïso rend nos mouvements harmonieux tout en gardant l’esprit martial, la martialité étant dans l’attitude, la pleine conscience, l’implication, l’engagement personnel et l’assiduité dans la pratique.

La persévérance nous fait progresser, « lentement mais sûrement » dirait-on. La maîtrise de nos gestes allant en s’affinant, nos enchaînements se fluidifient, prennent de l’allure, deviennent harmonieux et équilibrés.

Certains observateurs trouveront peut-être cela « beau », certes, mais cette beauté apparente n’est pas l’objectif premier, elle n’est que la conséquence de la pratique ce qui différencie l’aïki-taïso de la danse, des arts du cirque ou de la gymnastique. Le plus important n’est pas dans le regard des autres, chacun pratique pour lui en dehors de tout jugement, de comparaison et bien sûr de compétition.

La maîtrise de soi, corporelle, mentale et émotionnelle, est une démarche commune à tous, pratiquants d’arts martiaux ou de sport santé.

L’aïki-taïso est une passerelle entre différents Budos ou toutes activités physiques, aussi bien sur les tatamis qu’en dehors.

Dans la pratique

Chaque enseignant partage son expérience et s’appuie sur divers leviers pour amener les pratiquants progresser dans la gestuelle et dans la compréhension du mouvement.

Par une maîtrise globale de son propre corps : chaque pratiquant utilise sa morphologie et ses capacités physiques afin de réaliser au mieux les exercices et les mouvements.

Progresser dans la gestuelle

Par un assouplissement général du corps (musculaire, tendineux et articulaire) pour gagner en liberté de mouvement, amplitude et relâchement.

Par un renforcement de la tonicité pour améliorer la tenue du corps et la posture en privilégiant le gainage des articulations simples ou ensemble articulaire (colonne, épaule-bras-avant-bras poignet, etc)

Par le placement de la respiration et la coordination respiration-mouvement

Par une maîtrise consciente de l’espace par des exercices de synchronisation et de latéralisation.

Compréhension du mouvement

Prise en compte des différents facteurs entrant en ligne de compte dans un mouvement ou enchaînement déterminé,

Travailler sur la mémorisation,

Hausser le niveau de conscience pour gagner en ressenti, en attention et vigilance,

Passer d’une maîtrise de gestuelle externe à une relation externe-interne puis interne en position
statique

Développer la perception de ce qui nous entoure et une meilleure lecture du mouvement

Ouverture et opportunité

L’aïki-taïso permet de gagner en ouverture sur soi (Onore ni Katsu ; Victoire sur soi-même) comme une ouverture sur le monde (Se-Kai-Do-Jo ; Le monde est mon dojo).

Propos de Maître Tamura concernant les apports externes en aïkido.

Il y a une tradition de cela dans l’Aïkido, depuis l’époque d’O-Sensei. Makko-ho (yoga japonais -真向法), système de santé Nishi de Katsuzo Nishi Sensei), ou les méthodes de santé enseignées par Kenzo Futaki (Misogi no Renseikai – 禊の錬成会), O-Sensei essayait des choses lui-même et s’il les trouvait intéressantes, il les faisait aussi faire par les élèves. Il disait “C’est bon”, ou “Ce n’est pas bon!” (en riant). Il nous obligeait à le faire, mais nous disait : « Arrêtez si vous sentez que quelque chose ne va pas ». Je fais toujours des choses comme l’exercice du poisson rouge Nishi Health System tous les matins sans faute. De plus, après avoir fait les exercices JIkyou Jutsu, je suis instantanément capable de me tenir debout dans une posture détendue et naturelle, ils sont donc très efficaces lorsque vous ne vous sentez pas bien. C’est difficile lorsque vous vous entraînez avec un partenaire, mais lorsque vous les faites seul, vous êtes capable de voir à l’intérieur de vous-même. Pour savoir si oui ou non un exercice est bon pour vous personnellement

L’aïkido au service de l’aïki-taïso

L’aïki-taïso est généralement présenté comme une ou des préparations à l’aïkido mais ne serait-ce pas lcontraire ?

L’aïkido nous aide à appréhender les notions d’harmonisation, relâchement, tenue du corps (shiseï, kamae), respiration, mouvement, etc. un ensemble d’éléments qui nous met en relation avec nous-même et avec l’autre. L’aïkido nous donne beaucoup de réponses et de principes qu’il est possible de mettre en oeuvre
dans d’autres formes de travail (et même dans d’autres Budo) comme l’ont fait différents « Maîtres » de l’aïkido tel que Masamichi Noro.

Dai Dô Mu Mon : Aux grandes idées, pas de portail ou de barrières.

S’ouvrir sans se perdre


Il faut toutefois garder à l’esprit le sens de la pratique, la martialité (l’exigence et justesse) et ne pas s’i dans son monde. Le partage des pratiques est important pour maintenir une cohérence avec l’aïkido.